La COP26 sent le roussi

Un triomphe pour les négociateurs politiques, un échec de plus pour les activistes écologiques, un semi-aveu d’échec pour le président Alok Sharma. Une fois encore, la notion d’urgence n’existe pas pour ceux et celles qui ne comprennent par les conséquences de l’inactivité et de la procrastination sur un dossier qui nécessite pourtant une attention particulière. Une cause commune qui, théoriquement, réunit tous les acteurs politiques mais, dans la pratique, est victime des petits jeux politiques.

 

Ce que les dirigeants oublient, c’est que le problème ne se limite pas aux frontières. Certes, les dégâts sont inéquitablement répartis, entre les pays qui risquent de disparaitre et ceux qui pensent s’en tirer sans devoir modifier leur mode de vie, mais la balance des conséquences se rééquilibrera lorsque ceux qui pensaient être à l’abri découvriront la colère de la nature.

 

Il ne sera pas question de débat écologique ou environnementale. Je ne suis pas expert scientifique. En revanche, il nous est légitime de se demander comment des chefs d’Etat et de gouvernement, conscients des dangers du réchauffement climatique, continuent d’appliquer la politique de l’autruche sans questionner la méthode de cuisson de leur postérieur exposé au soleil.

 

La COP26 ne réunit pas les copains

 

Revenons d’abord à la COP26 à Glasgow. Durant deux semaines, les représentants de la grande majorité des Etats se réunissent pour discuter des objectifs, des méthodes et des plans d’action pour définir un accord sur les engagements dont chaque signataire se doit de respecter. Nulle question de contraindre qui que ce soit car il n’y a pas de contrôle extérieur pour s’assurer que les signataires respectent ce qu’ils ont signé et chaque Etat est souverain et donc se réserve le droit de se contraindre lui-même… ou pas.

 

Nous observons déjà un premier gros problème lors des négociations : la bonne foi des participants à combattre un problème commun et à appliquer ce qu’ils ont négocié.

 

Encore faut-il que les négociations aboutissent à des enjeux à la hauteur du problème, et c’est sur ce point que le constat d’échec est alarmant. La COP26 était la dernière chance, cette affirmation a autant de valeurs que la der des ders prononcée au lendemain de la Première guerre mondiale.

 

Rappelons qu’il y a plus d’une centaine de pays qui s’y sont rendus et dont il faut contenter. Cela passe par la recherche de compromis, le rabaissement voire l’abandon de mesures phares pourtant vantées avant le début du jeu des négociateurs et tout cela pour aboutir à un texte modifié à la dernière minute à la demande du ministre indien de l’environnement pour encore abaisser les ambitions climatiques.

 

Ces semaines ont démontré que la COP26 n’était pas une réunion amicale mais un nouveau bras de fer entre dirigeants aux priorités divergents.

 

Les coupables déclarés mais peu condamnés

 

Un des points positifs vanté par les négociateurs est la définition du principal responsable de la pollution mondiale: l’utilisation des énergies fossiles.

Celles-ci furent essentielles pour le développement de l’industrie et donc de l’évolution de la civilisation dans un monde où, à cette époque, les plus faibles se faisaient dévorées par petites bouchées ou entièrement si elles n’évoluaient pas vers une société industrialisée.

 

Depuis des décennies, nous payons le prix de cette négligence. La destruction de l’environnement n’était pas une priorité si elle permettait d’éviter celle de notre nation. Pour cela, il fallait des machines pour maintenir notre supériorité logistique et militaire. Véhicules, chars, avions, navires, locomotives, des moyens de locomotions énergivores mais au combien nécessaire en temps de guerre.

 

Cette logique s’applique encore aujourd’hui avec des engins plus performants (au combat, pas à la consommation, nous ne sommes pas chez un concessionnaire automobile) requis pour affirmer sa supériorité sur ses ennemis et croyez-moi, vous ne verrez jamais des chars d’assaut fonctionner à l’énergie solaire.

 

Donc, la préservation de l’environnement par la diminution des ambitions militaires, vous pouvez oublier. Bon, dans ce cas-là, discutons alors du volet civil. Parlons des entreprises qui polluent lorsqu’elles produisent, l’engagement des citoyens à adapter leur mode de vie et des produits à interdire ou à limiter leur usage.

 

Les citoyens au cœur de l’action climatique

 

Les dirigeants décident, les citoyens agissent. Parfois, les seconds n’attendent pas les premiers pour agir. Cependant, les politiques sont nécessaires pour fixer un cadre légal dont personne ne pourra échapper aux efforts à fournir au nom des objectifs climatiques.

 

Justement, quels sont les objectifs de la COP26 ?

 

Le premier est la diminution des émissions de CO2 puis la neutralité carbone d’ici 2050 pour maintenir la hausse des températures à 1,5C°. Pour ce faire, les signataires s’engagent à sortir du charbon, à cesser la déforestation, à accélérer la production des voitures électriques et à investir dans les énergies renouvelables.

 

Le second est la protection des habitats menacés par le réchauffement climatique via la protection et la construction d’écosystèmes.

 

Le troisième est la mobilisation financière avec un financement de $ 100 milliards par an destiné à aider les pays les plus pauvres dans leurs projets environnementaux.

 

Le quatrième est le renforcement de la coopération internationale par la confirmation des accords de Paris et l’accélération des mesures via la collaboration entre les acteurs publics et privés.

 

Sur le papier, tout cela montre que les consciences s’éveillent, que nous avons un projet pour inverser la tendance. Et que dire de plus ? Eh bien, objectifs ratés!

 

Nous sommes bien loin des 1,5C° promis à Paris. Nous dépassons déjà les 2 degrés et rien ne semble inverser la hausse des températures.

 

Quant à la déforestation et à la fin du charbon, ce ne sera pas pour tout de suite. La déforestation ne cessera qu’à partir de 2030, ce qui laisse le temps à des forêts de disparaitre. Le charbon, ce minerai autrefois vanté et qui est à présent considéré comme le plus gros pollueur parmi les énergies fossiles, a encore de beaux jours devant lui grâce à l’intervention indienne lors de la finalisation de l’accord. Beaucoup de pays dépendent de sa production et de son utilisation, il est donc difficile de changer radicalement lorsque nous ne sommes pas prêts.

 

Les voitures électriques et les énergies renouvelables sont encore au stade de développement. Lentement mais sûrement, elles seront amenées à devenir la norme. En attendant, leur production polluante doit servir à un lendemain plus vert et plus respirable.

 

Pour la protection des écosystèmes, il est important d’accepter de sacrifier des enjeux économiques pour préserver l’environnement. La déforestation et le charbon sont liés à cet objectif car la destruction des habitats naturels se justifient par le développement de l’agriculture, des habitats humains, des exploitations minières et des extractions pétrolières. Un changement de mentalité (voire de régime) est essentiel pour accomplir cet objectif.

 

Concernant les financements, c’est comme lors des catastrophes de grande envergure: des paroles pleines d’éclats avec des promesses de dons hallucinantes pour finalement n’envoyer qu’une liasse de billets dans un sachet. Les $ 100 milliards promis n’ont pas été versés dans leur totalité et les pays en développement qui espéraient un rattrapage restent sur leur faim.

 

Quant à la collaboration, elle repose encore une fois sur la bonne foi et les moyens donnés pour accomplir les objectifs fixés. Fini les excuses, les mensonges et le greenwashing, il est temps de passer de la parole aux actes.

 

J’assume pleinement ce constat pessimiste miné par les ambitions et les intérêts nationaux que chaque gouvernement défend. Derrière les sourires, les serrages de mains (au fait, non, COVID19 oblige), les beaux discours se cachent la realpolitik dont même la destruction programmée à long terme de la planète ne suffit pas à changer.

 

J’ai parlé des enjeux militaires. Il y aussi l’économie qui, pour certains Etats, reposent essentiellement sur les énergies fossiles ou l’exploitation de l’environnement. Leur principal argument est la protection du niveau de vie de leurs citoyens. Cela ne justifie pourtant pas la nécessité d’aborder la transition environnementale pour éviter de recevoir la catastrophe sans s’y être préparé.

 

Certes, des sacrifices sont nécessaires. Certes, le mode de vie doit changer. Certes, il faut oser se lancer vers l’inconnu. Et pourtant, des citoyens l’ont fait.

 

A l’inaction du monde politique, des personnes ont pris des mesures personnelles ou collectives pour montrer leur engagement envers une société plus durable et écologique.

 

Vous me direz que ce ne sont que des gouttes dans un océan, je vous répondrai que ce sont les gouttes qui font les océans. Nos petits gestes du quotidien entraînent des conséquences sur l’environnement si nous combinons tous les habitants de la planète.

 

Cessons de regarder le monde avec un regard fataliste et de croire en de belles promesses de sauvetage soudain. Réfléchissons plutôt sur le monde dans lequel nous désirons vivre puis agissons pour que l’autre monde que nous rêvons devienne réalité.

 

 

Quant aux COP, je ne parierai pas un kopeck sur leur utilité. Après la COP27 en Egypte de la der des dernières chances, la COP28 aux Emirats Arabes Unis de l’ultime chance, ne soyez guère surpris d’assister à la COP de « trop tard, on est foutu! ». A quand la véritable dernière réunion internationale pour que les dirigeants prennent conscience de l’enjeu dans leur jet privé?