L'Armistice : quand la guerre n'est plus propice

Le 11 novembre est une date importante à commémorer, à ne pas oublier. Il y a 98 ans se terminait officiellement un conflit comme un autre de l'époque mais qui tourna à la boucherie déraisonnée dans un esprit de destruction totale sans objectif perceptible pour les soldats qui combattaient : la Première Guerre mondiale.

Pour comprendre comment l'Europe s'est retrouvée dans ce bourbier, il faut se rappeler que le continent était majoritairement dominé par des monarchies où le Roi ou l'Empereur détenaient beaucoup de pouvoir, surtout pour les grandes puissances militaires. Ainsi, les conflits apparaissent plus facilement lorsque les Etats sont autoritaires en raison de la volonté du chef d'Etat qui prime sur l'intérêt national.

 

Face à l'horreur et aux millions de morts, cette guerre fut qualifiée de Der des Der. Sauf qu'en 1919 une large coalition fut formée pour aider les Blancs (coalition monarchiste et républicaine) face aux Rouges (les communistes) lors de la guerre civile en Russie. A peine remis d'un conflit, certains belligérants s'y remettent pour un résultat peu glorieux. Car malheureusement, dire que la Première Guerre mondiale serait la dernière était trop optimiste.

 

La violence éternelle

 

Depuis la fondation des civilisations, la guerre est une option primordiale pour la survie des peuples. Lorsque la diplomatie échoue, le voisin ne souhaite pas écouter et adopte une posture hostile, prendre les armes reste la seule possibilité pour survivre .

 

Cette raison légitime n'est pas toujours évoquée. Une guerre peut éclater juste parce que le seigneur en a décidé ainsi, notamment pour laver son honneur ou prendre quelque chose qui lui intéresse. Je ne parle pas seulement de territoire, des conflits ont déjà éclaté pour des biens matériels (ressources, bâtiment sacré, objet confisqué). Vous serez étonnés d'apprendre pourquoi des pays se sont entretués pour des futilités car un conflit nécessite un casus belli, une raison pour laquelle celui-ci doit avoir lieu.

 

Celle-ci peut revêtir plusieurs formes : indépendance, coup d'Etat, reconnaissance d'un peuple, possession d'un territoire, colonisation, guerre de religion, guerre de succession, insulte envers un Chef, annexion, soutien à une rébellion, libération d'un peuple face aux oppresseurs, redorer le prestige personnel, etc. Il y a tellement de possibilités qu'il est difficile de toutes les énumérer.

 

La mode d'aujourd'hui est la lutte contre le terrorisme. Le principe est simple : il y a un groupe terroriste sur place, on le bombarde, on envahit le pays si nécessaire et on démolit tout. Certes c'est péjoratif mais ce motif est largement utilisé au XXIème siècle. Al Qaida et Daech sont des groupes terroristes certifiés, c'est indiscutable. Le souci est son élargissement à des groupes identitaires ou de résistance souhaitant affirmer leur autonomie. Des groupes kurdes, palestiniens, ukrainiens, syriens, irakiens (sous l'occupation étasunienne) furent ou sont qualifiés de terroristes alors que leur revendication est souvent le droit d'un peuple à exercer sa légitimité. En l'absence de définition internationale, chaque pays décide qui rentre dans cette catégorie et peut ainsi créer une raison d'entrer en guerre. Vous comprenez pourquoi il y aura encore des conflits.

 

La technologie au service de l'humanité. Vraiment?

 

La technologie militaire est un paradoxe par rapport à l'armistice du 11 novembre. La Première Guerre mondiale fut qualifiée de dernier conflit en raison des armes employées sur le champ de bataille, y compris les gaz de combat qui furent pourtant interdits par la Convention internationale de La Haye en 1899 et en 1907. Durant la guerre froide, ce fut l'inverse à travers la course aux armements dans les domaines balistique et nucléaire, même si cela doit signifier la fin de l'humanité!

Aujourd'hui les chercheurs tentent de trouver un compromis : plus de destruction mais moins de victimes. L'exemple en date est l'emploi de drones (des engins non habités télécommandés à distance) pour réaliser des frappes ciblées dans le but d'abattre une ou plusieurs personnes importantes pouvant porter un coup dur contre l'ennemi. Pour l'instant, ils ne sont employés que contre les terroristes mais que se passera-t-il en cas de guerre entre Etats? Assistera-t-on à des assassinats politiques et militaires où les agents seront remplacés par des engins de mort aériens? Par Toutatis, les Gaulois auraient peur que le ciel leur tombe sur la tête s'ils étaient encore parmi nous!

 

Ce n'est qu'un aperçu de la possible guerre de demain. Les ingénieurs travaillent sur des robots pour les opérations de terre. Pour l'instant, ils ne sont qu'à l'étape de l'équilibre et de la mobilité, seuls de petits appareils équipés de caméra et de mitrailleuses fonctionnent. A quand des machines de guerre à la Terminator? Cela peut faire sourire mais des personnalités internationales tels que le PDG de Tesla Elon Musk, le co-fondateur d'Apple Steve Wozniak et le physicien Stephen Hawking plaident pour une interdiction totale de leur emploi au nom du respect du droit de la guerre. Ils n'ont pas tort.

 

L'un des facteurs freinant la déclaration de guerre est le coût démographique, toute personne décédant ne peut être remplacée à court et long-terme. Retirer cette contrainte, miser sur la technologie robotique et vous aurez une armée de robots pouvant écraser les pays qui n'ont pas les moyens de se payer des automates. L'apothéose serait une armée sans hommes, uniquement des machines sur le champ de bataille. Dans ce désir de puissance, les haut-responsables militaires seraient tentés de miser sur l'intelligence artificielle pour que tout se déroule automatiquement. Fini les contraintes humaines tels que le sommeil, le ravitaillement en aliment, l'objection de conscience. Sauf que le scénario à la Terminator pourrait devenir réalité si cette intelligence décidait de se retourner contre ses créateurs. La recherche de la paix ne serait plus qu'une futilité lorsqu'un Etat disposerait des moyens pour imposer la sienne. Dire que les armes les plus dangereuses entraîneraient la dissuasion n'est pas d'application si derrière elles se trouvent des Hommes capables de les employer pour aller jusqu'au bout de leurs ambitions.

 

L'Armistice a-t-il encore un sens aujourd'hui?

 

Célébrer un événement marquant la paix dans un monde où le risque de Troisième Guerre mondiale est abordée et la lutte contre le terrorisme est devenue la norme semble paradoxal. Il ne faut pas s'attacher à l'actualité mais au symbole de la fête.

 

L'Armistice rend hommage aux combattants morts pour leur pays. Il ne faut pas dire la liberté car il doit s'appliquer aussi bien aux force de l'Entente que celles de la Triplice. Les seuls gagnants sont ceux qui ont peu perdu, cela ne peut pas les priver de respecter les perdants officiels qui ont aussi bien souffert que les victorieux. Il faut insister sur le souhait des anciens belligérants de ne plus déclencher des conflits entre eux en protégeant la paix dans un monde où une confrontation armée peut éclater à tout moment. Insistons sur les résultats d'aujourd'hui en se rappelant des erreurs du passé pour ne plus les commettre dans le futur. Cela s'appelle l'histoire mais tous ne la suivent pas et préfèrent continuer à répéter les échecs plutôt que d'en tirer des leçons, jusqu'au jour où le coût de l'apprentissage sera trop lourd pour ne pas en tenir compte à l'avenir.

 

Article utilisé

 

http://www.lemonde.fr/culture/visuel/2015/10/17/faut-il-interdire-les-robots-tueurs-autonomes_4790497_3246.html

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