Elections présidentielles aux Etats-Unis : le choc des détails

Un sondage bidon en guise d'exemple
Un sondage bidon en guise d'exemple

Courage! C'est bientôt la fin! Les élections présidentielles sont bientôt terminées. Il reste moins d'une semaine pour entendre de nouveaux bavardages, absurdités et joutes verbales de la part de deux candidats tellement englués dans les affaires que Pritt devraient songer à les engager dans le département publicitaire.

 

Les élections, c'est du sérieux. Du moins théoriquement parce que cette année, les analystes et (pseudo-)experts des débats considèrent que le niveau a atteint un niveau bas par rapport aux éditions précédentes. Pourquoi voter pour telle ou telle personne? Devra-t-on choisir la moins pourrie des deux?

 

Car aux Etats-Unis, chaque détail compte. Un mot ou un fait de travers peut basculer la balance. Le vainqueur des sondages peut rapidement se retrouver au plus bas. Nous ne reviendrons pas sur les différents scandales, critiques et attaques, vous êtes supposés les connaitre si vous suivez l'actualité. Nous parlerons des manières pour perdre une élection malgré la confection d'un programme en béton armé de sujets incompréhensibles pour le commun des mortel.

 

Alors que les médias annonçaient la probable victoire de Clinton, les sondages actuels sont plus incertains. Certains disent que Clinton conserve une avance, d'autres montrent que Trump la devance.

 

Véridique? Difficile de se prononcer car les résultats se basent sur des opinions à l'échelle nationale. Or, les élections présidentielles sont indirectes en raison du principe des grands électeurs : chaque Etat comporte un nombre basé sur la démographie (les plus petits en ont 3, le plus grand en a 55), le candidat qui remporte la majorité simple dans un Etat remporte la totalité des voix de celui-ci, celui qui parvient à en accumuler minimum 270 devient président. Cela signifie que chaque Etat a un électorat différent en raison des valeurs, de la démographie et des tendances démocrates-républicaines. De plus, un sondage ne peut prédire qui ira voter pour le candidat cité dans l'enquête d'opinion car il peut changer d'avis ou ne pas se présenter aux urnes. Comment expliquer ce revirement?

 

Quand un geste fait toute la différence

 

Aux Etats-Unis, la notion entre vie privée et vie publique est floue, le moindre geste peut peser lourd. Les deux candidats n'ont pas été épargnés : Clinton tressaillit lors de la commémoration des attentats du 11 septembre, laissant sous-entendre qu'elle n'aurait pas la santé pour diriger un pays ; Trump apparut dans une vidéo où, oubliant de couper son micro, se vanta d'attraper les femmes d'une manière peu orthodoxe ni catholique, d'autres femmes ont décidé de protester contre lui pour harcèlement. Même si le cas du républicain découle d'un propos déplacé, il dut savoir qu'il s'exprimait dans une émission et donc qu'il portait un micro. Et oui, une simple erreur gestuelle peut entraîner de graves conséquences.

 

Leçon N.1 : la communication ne passe pas seulement par l'oral, le gestuel compte beaucoup. Faites un mouvement déplacé, montrez un signe de faiblesse, apparaissez dans une vidéo compromettante et vous verrez, votre popularité diminuera.

 

La parole est d'argent mais le silence est d'or

 

Impossible de leur demander de la boucler, il faut bien dire quelque chose d'intelligent pour rester crédible. Parfois, il est préférable de ne pas l'ouvrir.

Un futur président se doit de rester proche des citoyens qu'il est sensé représenter. Qui aurait envie de voter pour un candidat se vantant d'éluder l'impôt grâce à des montages fiscaux? Pour celui qui prétendit que 47 % des électeurs voteront pour l'autre candidat et qu'il ne faut pas s'en préoccuper?  Ou encore pour celui qui considéra que laisser des troupes en Irak pendant 100 ans supplémentaires est plausible malgré l'impopularité de la guerre, laissant sous-entendre la continuité de son prédécesseur impopulaire au début et surtout à la fin de son mandat?

 

Les exemples cités sont des cas extrêmes. Cela montre que le moindre propos peut être réutilisé par l'adversaire pour l'enfoncer, allant jusqu'à le déformer ou ne pas le resituer dans le contexte (les 47%  évoqués par Mitt Romney est un bon exemple où des propos déformés raconteraient que ce pourcentage correspondrait au nombre d'assistés, ce qui est mal vu auprès de l'opinion publique).

 

Tous ces discours ont-ils eu un impact dans les sondages? Possible car déterminer précisément quel détail modifie l'opinion est difficile, tout est volatile pour l'électeur sans convictions.

 

Leçon N.2 : dire n'importe quoi est excellent pour diminuer dans les sondages. Sinon, vanter des propos impopulaires fonctionne très bien aussi. Même si vous prononcer un discours cohérent, votre adversaire trouvera toujours le moyen de le détourner pour vous le renvoyer en pleine figure.

 

Big Brother est de sortie

 

Les deux précédentes leçons fonctionnent mieux grâce à l'apparition de nouveaux médias en raison de la rapidité de la diffusion de l'information. L'Internet a énormément changé la donne. Les internautes peuvent répandre une vidéo compromettante de site en site, les journaux considèrent que la lecture numérique prend de l'importance face à la presse papier.

 

Les candidats sont ainsi scrutés sous tous les angles, y compris ceux auxquels ils préféreraient garder secrets. Aucun d'entre eux ne souhaiteraient apprendre que des milliers voire des millions d'inconnus soient au courant des affaires louches, témoins de propos ou gestes déplacés. Cela pèse dans l'opinion publique car un président est sensé incarné le modèle de la citoyenneté. Qui voudrait élire quelqu'un trempé dans une affaire de corruption? Non, c'est une mauvaise question car des millions d'électeurs le voudront. Adressons la plutôt aux électeurs indécis, prêts à changer de camp comme ils changeraient de chemise.

 

Ajoutons à cela la frontière floue entre la vie publique et la vie privée aux Etats-Unis dans le monde du journalisme si leur cible est une personnalité publique se trouvant sur la place publique. Le candidat pourrait certes tenter de faire retirer la vidéo compromettante mais réussira-t-il? Et si c'est le cas, serait-il bien vu en s'attaquant à la liberté de la presse et donc à la liberté tout court?

 

Leçon N.3 : ne pas tenir compte du poids des médias, surtout des nouveaux, est synonyme de défaite si vous n'êtes pas capable de les maîtriser. La communication n'implique pas seulement l'émetteur mais aussi le récepteur. Vous pouvez émettre un bon message mais considéré comme mauvais si le récepteur l'interprète négativement à sa manière. Les analystes scrutent le moindre détail donc, méfiance.

 

Pouvoir ne signifie pas tout avoir

 

Les points abordés précédemment insistent sur les détails dont le candidat peut en garder un relatif contrôle. Cependant, il ne peut pas avoir une influence sur tout ce qu'il fait sa campagne. L'actualité est cruelle, nous avons vu que les médias ne sont pas toujours tendres lorsqu'ils publient. Ils ne sont pas les seuls.

 

Les agences de surveillances et les institutions publiques n'arrêtent pas leur travail lors des élections. Si un candidat a commis une faute, il est normal qu'ils le signalent, même si celui-ci les accusent de partialité en raison du timing défavorable. Clinton en fait les frais avec l'enquête du FBI au sujet des mails secrets.

 

Lorsqu'il s'engage dans la lutte pour la Maison blanche, un candidat ne doit pas oublier que la victoire n'est jamais acquise, même s'il bénéficie d'accords douteux (pouvant se retourner contre lui si dévoilés) pour facilité son accession à la présidence.

 

Leçon N.4 : rien n'est jamais joué d'avance. Un imprévu peut facilement enrailler la mécanique et ne pas reprendre la barre signifie un risque accru de défaite électorale.

 

 

 

Si un jour vous connaissez un citoyen étasunien souhaitant devenir Président, adressez-lui ce petit guide. Tiens, pourquoi ne commencerais-je pas à rédiger "Perdre les élections présidentielles aux Etats-Unis pour les Nuls. Tout pour devenir un vrai loser." ?

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